Complément au Journal de l’alpha no 200.
Au travers du dessin, l’alchimie de la rencontre a lieu entre le passé et le présent, entre d’où je viens, où je suis, et où je vais. C’est un autre rapport au temps, qui amène les participants à s’ouvrir, à s’exprimer et à livrer une petite part d’eux-mêmes. Ils sont engagés à part entière dans la réalisation du film qu’ils voient se monter au fur et à mesure des séances. C’est un vrai projet collectif.
Voici comment se déroulent les ateliers :
- Dès le départ, j’annonce aux participants que nous allons avoir des sessions de dessin/arts plastiques et des temps destinés à l’enregistrement de leur voix. Selon le public et l’infrastructure qui m’accueille, ces temps varient. Pour que les participants apprennent à me connaitre et osent prendre la parole, je ne sors le micro qu’au bout de 2 ou 3 séances de dessin.
- Pour le son, je procède de 2 manières. J’enregistre l’ensemble des séances, me baladant de table en table avec le micro sur moi et/ou le posant sur les tables alors que les apprenants sont en pleine création. On oublie vite la présence de l’enregistreur. J’obtiens du coup des moments parfois drôles et très inattendus. Il y a aussi des temps d’arrêt où nous ne faisons qu’enregistrer. Là je propose aux participants un moment intime, on se met en cercle et je lance la discussion sur leurs productions, sur les sujets qu’on a décidé d’aborder ensemble. C’est davantage une conversation qu’un tour de table où chacun parlerait à tour de rôle. Je pose des questions aux plus taiseux pour qu’ils participent aussi. Le but c’est de les mettre le plus à l’aise possible pour qu’ils osent prendre la parole. Ces sessions sont rendues possibles grâce aux temps de création où ils apprennent à me connaitre. J’essaye d’être là pour les écouter, et qu’ils aient envie de me/nous livrer un peu d’eux-mêmes, de leur histoire.
Ces ateliers sont donc avant tout des rencontres entre des participants, un animateur et un artiste. Ils ont pour objectif de mélanger les territoires et de mettre une articulation entre les champs social et artistique. Cette collaboration aboutit à des échanges d’une grande richesse.
Les ateliers sont en quelque sorte des laboratoires d’expérimentation où le groupe est amené à travailler sur un projet commun. Il participe à une production, pour « laisser une trace ». Le court-métrage peut devenir un outil pour transmettre un message où des sujets essentiels pour les participants et la société sont abordés. Il ouvre une porte, suscite intérêt et invite à la réflexion, au questionnement et à l’échange…
Ainsi, un des ateliers que j’ai animés s’est déroulé au sein de CFEP, Centre féminin d’Éducation permanente à Saint-Josse, où étaient réunies les participantes des ateliers d’égalité et de citoyenneté. Pendant 3 semaines, à raison de 8 heures par semaine, elles ont dessiné à partir de leurs photographies de famille et ont parlé de leurs histoires personnelles, de leurs parcours et de leurs places en tant que femmes issues d’une autre culture en Belgique.
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- Chemins croisés
- Atelier de dessin et d’expression au Centre féminin d’Éducation permanente à Saint-Josse.
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D’autres ateliers ont été réalisés dans une perspective transdisciplinaire axée sur la dimension holistique du cheminement thérapeutique spécifique en psychogériatrie. J’ai proposé aux bénéficiaires d’établissements de soins de remobiliser par le dessin et la parole des clichés photographiques d’un passé ainsi réveillé. Travail à la fois tout simple dans son dispositif mais étonnamment subtil dans sa conduite. Ce travail a été notamment mené avec les patients du service de psychogériatrie de la clinique Saint-Jean (Bruxelles), à raison de 13 séances de 2 heures réparties sur 2 mois.
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- Les fleurs sont devenues des ailes
- Film atelier rotoscopie réalisé avec les patients du service psychogériatrie de la clinique Saint-Jean.
Atelier encadré par Charlotte Dunker et l’équipe médicale du service psychogériatrie.
Réalisation : Charlotte Dunker.
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Une démarche semblable a été mise en œuvre (selon des modalités un peu différentes) avec les résidents, en grande partie des personnes d’origine étrangère, à la Résidence Schuman (maison de repos, Bruxelles) :
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- Le temps, pourquoi penser à ça…
- Court-métrage réalisé par Charlotte Dunker avec les résidents de la maison de repos Schuman.
Automne 2015.
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Charlotte Dunker, dessinatrice-réalisatrice.