Un des objectifs d’une récente étude du GIRSEF, intitulée Évaluation de la politique d’alphabétisation en région de Bruxelles Capitale et en Région wallonne (commanditée par le Comité de pilotage de la Conférence interministérielle), est de produire une vision d’ensemble des politiques d’alphabétisation afin d’en évaluer la cohérence et la complémentarité. Cette étude apporte enfin un cadre global pour la lecture des politiques d’alpha et, grâce au modèle théorique utilisé à savoir le modèle des économies de la grandeur de Boltanski et Thévenot, elle analyse les tensions entre ces politiques. Toutefois, l’analyse est quelque peu réductrice puisqu’elle propose en quelque sorte une photo zoomée sur les politiques actuelles d’alphabétisation, alors qu’une photo grand angle permettrait de prendre en considération différentes composantes en interaction avec ces politiques : les politiques connexes (parmi lesquelles l’accompagnement et le suivi des chômeurs, l’immigration et l’emploi) et les politiques d’éducation, autant d’éléments clés dans le paysage de l’illettrisme et de la formation en alphabétisation. Par ailleurs, l’analyse prend appui sur des échelles de grandeurs – des sujets considérés comme ‘grand’ ou ‘petit’ selon leurs caractéristiques et leurs valeurs de référence. Or, dans un domaine comme l’alpha, il s’agit d’être prudent en utilisant ce genre d’outil, et notamment de ne pas amalgamer échelle de valeurs et échelle de compétences… Cet article détaille les raisons pour lesquelles l’analyse proposée dans le rapport d’évaluation des politiques d’alphabétisation mériterait d’aller plus loin, en intégrant toutes les politiques qui sont en interaction avec les politiques d’alphabétisation et en modifient la tonalité.
Anne Godenir, « Évaluation des politiques d’alphabétisation : dans le "meilleur des mondes" ? », Journal de l’Alpha no 190, juin 2013.